C’est un peu la question qui tourmente le monde agricole ! Et pour cause, quand on observe la météo des dernières saisons, on se demande évidemment si nos cultures auront assez d’eau dans les années à venir…
Difficile de le savoir mais nous avons quand même posé la question à Emmanuel Buisson, notre expert météo. Il ne lit pas l’avenir dans une boule de cristal, ni dans du marc de café, mais grâce au savoir-faire de l’équipe de data scientists Weenat et aux milliers de jeux de données dont nous disposons il a pu nous projeter dans le climat de demain à l’occasion du LFDay, organisé par La Ferme Digitale.
Venez avec nous, on vous emmène !
Changement climatique, météo et disponibilité de l’eau pour l’agriculture
Tout d’abord, repartons du changement climatique et de son impact. Tous les jours nous pouvons constater ce changement : des orages de grêles de plus en plus violents, des vagues de chaleur, des épisodes de sécheresse, (vous vous souvenez de l’état des nappes phréatiques en 2022 ?), etc.
Ces phénomènes et leurs conséquences inquiètent le monde agricole. Notamment quant à l’eau disponible pour les cultures, car sans eau, pas d’agriculture possible.
D’ailleurs, Emmanuel Buisson, expert météo de Weenat, précise que « la disponibilité en eau douce a diminué de 14 % sur les 40 dernières années ».
Changement climatique : de quoi parle-t-on ?
Dès qu’on commence à parler climat, il faut faire un petit pas en arrière, car pour savoir ce que l’avenir nous réserve, il faut déjà comprendre ce que le passé nous a montré.
Alors faisons ce pas en arrière, d’une quarantaine d’années.
Les constats des 40 dernières années
Tous les constats qu’Emmanuel Buisson a partagés sont basés sur une comparaison décennale, c’est-à-dire, que notre équipe a comparé les données de 1986 à 1995 avec les données de 2016 à 2023.
Et voici ce qu’il en ressort :
- Une augmentation des températures d’1,3°C en moyenne :
- Une variation de la pluviométrie mais sans signature nette à l’échelle du pays :
- Une légère augmentation du nombre de jours sans pluie sur le grand quart
nord-est :
- Une demande en eau plus importante :
- Une variabilité inter et intra annuelle de la pluviométrie :
« Revenir sur ces constatations est essentiel pour parler de l’évolution du climat et se projeter en 2040, parce que ces évolutions impactent forcément le monde agricole, qui doit sans cesse s’adapter. » précise Emmanuel Buisson.
Avec le changement climatique, on s’attend à voir des cultures en difficulté et on ne peut pas déplacer un champ. Le monde agricole a besoin d’anticiper de nouvelles filières pour pouvoir adapter le territoire.
- Comment minimiser l’impact de l’aléa sur mon rendement ?
- Quelle faisabilité pour mettre en place une nouvelle filière sur mon territoire ?
- Quels seront les impacts pour ma filière ?
Ce sont des questions que se posent les coopératives, industriels de l’agro-alimentaire, semenciers et Chambres d’agriculture. Ces acteurs ont besoin de se projeter dès aujourd’hui pour anticiper demain et prendre des décisions durables.
À quoi faut-il s’attendre demain ?
Pour avoir une idée de l’eau disponible pour nos cultures en 2040, on s’est donc projeté en 2040 pour observer la température et la pluviométrie à cette période, avant d’aller regarder leurs conséquences sur les cultures.
Les Projections Agroclimatiques : comment ça fonctionne ?
Pour pouvoir se projeter en 2040, Weenat utilise une approche « top-down » c’est-à-dire qu’elle se sert des données observées comme référence pour calibrer les modèles de climat qui utilisent des scénarios d’émissions de CO2 à l’échelle planétaire.
L’équipe de data scientists de Weenat travaille sur des méthodes permettant de reconstruire les tendances climatiques dans des séries météorologiques qui sont pertinentes pour avoir une approche plus adaptée aux stades phénologiques.
Voici les résultats de notre projection. Roulement de tambour. 🥁
Parlons tout d’abord de la température. En 2040, la température pourrait augmenter en moyenne de 1,6°C avec une moitié Est de la France plus impactée, la façade maritime est quant à elle un peu plus protégée.
Du côté des précipitations, il n’y a pas de marqueur fort. Les premiers marqueurs de pluviométrie apparaissent à partir de 2050.
Cependant, entre la recharge hivernale et la période estivale, on voit des évolutions différentes entre le bassin méditerranéen et le Grand Ouest :
- Variabilité saisonnière plus marquée sur le Grand Ouest
- Diminution des précipitations à horizon 2025 sur le Pourtour Méditerranéen
Quelles conséquences pour les cultures ?
Ces projections apportent un peu plus de visibilité sur les difficultés auxquelles le monde agricole pourrait se confronter.
Des acteurs comme Axéréal, GCF ou encore NatUp travaillent avec Weenat afin d’anticiper demain, et de prendre dès aujourd’hui, les meilleures décisions pour leurs cultures.
Le blé aura-t-il assez d’eau en 2040 ?
Avec une érosion des rendements ces dernières années, Axéréal a besoin de connaître ses capacités de production à échéance 2030, 2040, 2050 et ouvrir les réflexions à l’échelle de la culture et de l’exploitation agricole.
« Avec la douceur hivernale, 80% de nos orges de printemps sont semés à l’automne. Et sur la Beauce en 10 ans, on a gagné 10 tonnes de productivité en maïs », témoigne Thomas Monville, du service agronomie d’Axéréal.
Prenons maintenant l’exemple du blé. Entre avril et juin, il a besoin de 250 mm d’eau pour pouvoir grandir. Comparons, dans l’Aube, le Loiret et l’Allier le cumul des précipitations entre 2000 et 2040 sur la période avril-juin.
Les précipitations seront-elles suffisantes pour ces cultures ?
D’après les projections il devrait y avoir suffisamment d’eau, peut-être un peu moins dans le Loiret.
Emmanuel Buisson précise « Il s’agit d’une moyenne. Cela pourra être plus ou cela pourra être moins. En 2022 les précipitations n’ont pas été suffisantes pour le blé, alors qu’en 2024, la pluviométrie était excessive, si bien que les agriculteurs ont eu des difficultés au moment des semis. »
L’organisation des campagnes agricoles risque d’être de plus en plus complexe, et il faudra être flexible.
« Tous ces sujets-là, on ne veut pas les subir mais être proactifs et donc ouvrir des réflexions sur les mesures d’adaptation » conclut Thomas Monville.
Une vigne en avance = une vigne qui ne sera plus sous pression ?
« La température moyenne en 2040 devrait être autour des températures vécues en 2022, comme le montre ce graphique. » indique Emmanuel Buisson avant de poursuivre « cela nous permet d’avoir une idée bien précise des conséquences de l’évolution des températures en terme agronomique. »
En effet, comme en 2022, la vigne risque d’être en avance, aux différents stades phénologiques. Et cela va modifier profondément l’impact de certains aléas comme le gel, l’échaudage, les précipitations, la pression maladie, etc.
Avec l’évolution des températures, il pourrait y avoir moins de gel en 2040, mais celui-ci risque d’être encore plus dévastateur pour les cultures si les stades phénologiques sont plus avancés.
Avec une floraison, une véraison et aussi des vendanges en avance, c’est aussi l’organisation des exploitants viticoles qui sera impactée par le changement climatique.
Y aura-t-il de l’eau pour les prairies ?
C’est la question qu’a posé NatUp à Weenat. Et pour y répondre Weenat s’est penchée sur la recharge hivernale en regardant l’évolution du cumul de précipitations entre le 1er novembre et le 31 mars.
Comme on le voit ci-dessous, en Normandie, il ne devrait pas y avoir de problème d’eau en 2040. Néanmoins il s’agit d’une moyenne.
« Cela ne signifie pas que certaines années seront sèches et d’autres pluvieuses », détaille Emmanuel Buisson.
À l’horizon 2040, les acteurs du monde agricole devront donc s’adapter aux défis posés par les changements climatiques, notamment en ce qui concerne la disponibilité de la ressource en eau. Les variations prévues dans les températures et les précipitations nécessiteront des ajustements dans leurs pratiques et un suivi de précision.
Weenat est là pour accompagner les agriculteurs dans cette transition.
Pour en savoir plus sur comment nous pouvons vous aider à anticiper ces changements, contactez-nous !